Jean-Marc Morandini se présente en victime d'une cabale au premier jour de son procès pour harcèlement sexuel
Un prévenu agacé: Jean-Marc Morandini s'est présenté mardi devant le tribunal correctionnel de Paris en victime d'une cabale journalistique, au premier jour de son procès pour le harcèlement sexuel d'un jeune comédien et pour travail dissimulé.
"Tout allait bien entre (moi et les jeunes acteurs de la web-série +Les Faucons+ qu'il produisait) jusqu'à la publication, en juillet 2016, d'un article des Inrocks", se défend à la barre l'animateur de télévision de 57 ans.
"A partir de cet article, il y a eu des problèmes avec tous les acteurs. La journaliste leur a monté la tête", poursuit M. Morandini, à nouveau devant un tribunal six mois après une condamnation (non définitive) pour corruption de mineurs sur trois adolescents entre 2009 et 2016.
"C'était pour voir leurs limites", explique l'animateur en veste noire sur une chemise blanche à col ouvert.
L'enquête a révélé qu'une pseudo "directrice de casting", Catherine Leclerc - en réalité Jean-Marc Morandini sous pseudonyme - avait adressé aux comédiens des courriels leur demandant avec insistance des vidéos d'eux nus, pubis rasé et des scènes de masturbation parfois avec éjaculations.
"Pourquoi demander aux jeunes acteurs de se raser ?", demande le tribunal. "Pour apparaître plus jeunes ? Ressembler à des mineurs alors qu'ils étaient majeurs ?".
"Non, c'était pour l'esthétique", réplique le prévenu, qui ajoute "ça n'a aucun sens cette question".
Et pourquoi inventer le personnage de "Catherine Leclerc" qui signait "maman" les mails adressés au plus jeune des acteurs, Gabriel P., présent à l'audience, le seul des plaignants pour lequel le chef de harcèlement sexuel a été retenu contre le prévenu.
"J'ai créé le personnage virtuel de Catherine pour ne pas apparaître sur le site du casting. Sinon les candidats auraient postulé à cause de mon nom", balaie l'animateur.
Selon les enquêteurs, ce "personnage totalement fictif" constituait une "figure maternelle et sécurisante inspirant confiance", notamment au plus jeune des plaignants, comédien sans agent, sans formation et sans expérience du milieu du cinéma, l'incitant "à toujours repousser ses limites dans l'acte de nature sexuelle, sous le prétexte allégué de travailler sa posture de comédien".
Dans deux de ses mails "Catherine" avait demandé au jeune homme s'il était prêt à faire une fellation à Jean-Marc Morandini "qui n'est pas n'importe qui".
- "Tentative d'escroquerie" -
"+Maman+, c'était un clin d’œil", affirme l'animateur. Quant à l'évocation d'une fellation, "dit comme ça devant un tribunal ça prend évidemment des proportions", se défend-il. "C'était un jeu de séduction", avance-t-il en récusant toute "attirance" à l'égard de Gabriel, qu'il concède néanmoins avoir trouvé "charmant".
Un assesseur persiste: "j'ai quand même du mal à comprendre en quoi faire une fellation peut améliorer le jeu d'acteur".
"On se concentre là-dessus mais on a parlé de plein d'autres choses", répond le prévenu.
Sur les faits de travail dissimulé, l'animateur soutient qu'il s'agissait de "tourner des essais". "Les comédiens savaient qu'ils ne seraient pas payés. C'étaient des bénévoles".
La première journée d'audience s'achève quand un coup de théâtre survient.
Jean-Marc Morandini, couvé des yeux par ses avocates, annonce qu'un avocat lui a demandé 60.000 euros pour que Gabriel retire sa plainte.
Stupeur du tribunal et du jeune plaignant étranger à cette demande. "Qui est cet avocat ?", demande le tribunal. L'animateur se tait.
- "Est-il dans cette salle ?"
- "Oui !", répond l'animateur en montrant du doigt un avocat des parties civiles, Arash Derambarsh (qui ne défend pas Gabriel).
L'avocat s'insurge et dément toute demande de transaction. "60.000 euros, 21 novembre (2022), 18h30 dans vos bureaux", triomphe le prévenu.
L'avocate de M. Morandini évoque "une tentative d'escroquerie". Son client sourit.
L'audience doit reprendre mercredi.
L.Boyle--NG