Les actionnaires de Generali tranchent en faveur du PDG sortant
Après une bataille acharnée, le verdict est tombé: les actionnaires de l'assureur italien Generali ont voté vendredi pour la reconduction du PDG Philippe Donnet, infligeant ainsi une défaite aux deux milliardaires frondeurs qui s'y opposaient.
Au total, 55,9% du capital représenté lors de l'assemblée générale s'est prononcé pour la liste du conseil d'administration sortant, alors que 41,7% ont opté pour celle du camp adverse, emmenée par le magnat de la construction Francesco Gaetano Caltagirone.
"La majorité s'est exprimée clairement et sans ambiguïté pour la liste présentée par le conseil d'administration sortant", a commenté M. Donnet, un polytechnicien français de 61 ans, à l'issue de l'assemblée réunie en visioconférence.
70,73% du capital de Generali était représenté, un taux de participation record. Rapporté à l'ensemble du capital, M. Donnet, qui entame ainsi un troisième mandat, a pu s'assurer le soutien de 39%, alors que le camp des frondeurs a réuni 29%.
M. Donnet a pu compter sur les voix de Mediobanca, principal actionnaire avec 12,8% du capital mais 17,2% des droits de vote, la holding De Agostini (1,44%) et une série de fonds d'investissement, surtout étrangers, qui s'étaient rangés publiquement derrière lui.
Le choix des actionnaires institutionnels, soit 35% du capital, s'est révélé décisif pour cette bataille inédite. Les deux principales sociétés de conseil aux actionnaires ISS et Glass Lewis, très écoutées par les investisseurs étrangers, avaient en effet recommandé de voter pour la liste de M. Donnet, plus crédible selon elles.
La fronde contre la reconduction du PDG avait été menée par deux grandes figures du capitalisme italien, M. Caltagirone, 79 ans, et Leonardo Del Vecchio, 86 ans, fondateur du fabricant de lunettes Luxottica et deuxième fortune d'Italie.
- Appel à l'unité -
MM. Caltagirone (9,95%) et Del Vecchio (8%) avaient reçu le soutien de la fondation CRT (1,7%) et aussi de la famille Benetton (4%), qui s'est ralliée à eux, préférant les candidats des "entrepreneurs" à la "liste autoproclamée" des administrateurs sortants.
Face à M. Donnet, c'est Luciano Cirina, 56 ans, ancien responsable de l'Autriche et de la région Europe de l'est de Generali, qui avait brigué, en vain, le poste de PDG. Le groupe, qui y voit une "trahison", l'a limogé peu après l'annonce de sa candidature.
"Nous allons maintenant travailler tous ensemble avec détermination pour préserver les intérêts de toutes les actionnaires", a promis M. Donnet, lançant ainsi un appel à l'unité.
Une troisième liste, présentée par Assogestioni, qui regroupe des investisseurs institutionnels italiens, n'a recueilli que 1,9% des voix.
Les frondeurs ont publié en mars un plan stratégique présenté comme étant "plus ambitieux" que celui de M. Donnet, baptisé "Réveiller le lion", en allusion à l'emblème de l'assureur.
Ce plan table sur une hausse du bénéfice par action de plus de 14% par an d'ici 2024, contre un objectif de 6 à 8% prévu par M. Donnet, et se montre plus généreux en termes de fusions-acquisitions, avec un trésor de guerre de 7 milliards d'euros.
- Réveiller le lion? -
Les dissidents font valoir que Generali a perdu du terrain par rapport à Allianz, Axa ou Zurich Insurance, avec une capitalisation qui a diminué de 8,2 milliards d'euros ces 15 dernières années, là où ses concurrents ont augmenté la leur.
Les partisans de M. Donnet rétorquent que depuis son arrivée en novembre 2016, le cours du titre a grimpé de 55%, bien au-dessus de la moyenne du secteur, et que le rendement des actionnaires s'est accru de 106%. Et en 2021, pour la troisième année d'affilée, l'assureur a affiché des résultats record.
Faut-il réveiller Generali? "Le lion s'est déjà réveillé ces dernières années, d'importantes transformations ont été réalisées", a commenté à l'AFP Giuliano Noci, professeur de stratégie à l'école Polytechnique de Milan, jugeant "positif" le bilan de M. Donnet.
Mais MM. Caltagirone et Del Vecchio, qui disposeront de trois sièges au futur conseil d'administration, n'ont sans doute pas dit leur dernier mot.
Ils pourraient aussi augmenter la pression sur Mediobanca, leur principal adversaire dans la lutte pour le contrôle de Generali, qu'ils accusent d'agir en coulisse pour y imposer les dirigeants de son choix.
Les accusations portées contre Mediobanca sont d'autant plus explosives que M. Del Vecchio en est le principal actionnaire, avec une part de 19,4%, et que M. Caltagirone en détient 3,1%.
W.Prendergast--NG