Dans le nord de la Grèce, la puanteur et l'inquiétude autour des lacs asséchés
"Le lac s'est littéralement asséché": dans le nord de la Grèce qui subit les assauts du réchauffement climatique, habitants et experts s'alarment de l'état de plusieurs étendues d'eau de la région où l'on peut désormais se promener ou suivre des traces de pneus de motos.
Terre craquelée, poissons morts et odeurs nauséabondes: le lac de Koronia, près de la deuxième ville de Grèce, Thessalonique, subit les méfaits des températures record enregistrées cet été, tout comme les trois autres lacs naturels de la région, Pikrolimni, Volvi et Doïrani.
Jour après jour, les riverains de ce lac de 42 km2 voient l'eau disparaître, découvrant poissons et oiseaux morts.
Des flamants roses ont trouvé refuge dans certaines parties où le bas niveau d'eau leur permet de dénicher de la nourriture.
"La puanteur du lac devient très forte. Si cet hiver n'est pas bon, si on n'a pas des chutes de neige et des pluies suffisantes, on aura un gros problème l'année prochaine", prévient Kostas Hadzivoulgaridis, président de la communauté locale.
"Nous avons besoin que les organismes compétents prennent des mesures immédiates pour protéger le lac", affirme ce quinquagénaire à l'AFP.
A une cinquantaine de kilomètres de là, Pikrolimni est le seul lac à d'eau salée en Grèce continentale grâce aux roches volcaniques proches. Mais en ce mois de septembre il ne reste que les motifs géométriques caractéristiques de l'eau évaporée.
Aux alentours, une station thermale et des hôtels ont été abandonnés progressivement ces dernières années.
"Ces lieux étaient autrefois animés par les touristes, et maintenant on voit sur internet (des vidéos) de motards faisant la course sur le lac. C'est tragique!", s'indigne Argyris Vergis, un octogénaire de la région.
"C'est le premier été où le lac est dans un tel état. Il n'y a pas eu de pluie, l'eau a disparu et le lac s'est littéralement asséché", poursuit-il.
- Evaporation -
Selon le Centre grec de la protection des biotopes, de janvier à août, les niveaux des quatre lacs de cette région de Macédoine centrale se sont trouvés "constamment aux niveaux les plus bas de la période 2013-2024".
Ces deux dernières années, les précipitations annuelles locales ont été "très faibles" et les températures enregistrées depuis début 2024 sont les plus élevées de la dernière décennie, selon l'hydrologue Irini Varsami.
"Cette situation affecte le lac soit directement par l'évaporation, soit indirectement en augmentant les besoins d'irrigation de la zone environnante" de la plaine de la Macédoine, l'une des plus importantes du pays, explique cette scientifique de 29 ans.
Les experts sont à la recherche de solutions pour préserver l'équilibre des écosystèmes naturels.
"Il est trop tôt pour tirer des conclusions sur l'impact sur la biodiversité mais il faut étudier l’évolution de la faune pendant l’hiver", dit Anthi Vafiadou, cheffe de la section de protection de ces zones.
L'hiver a été particulièrement doux en Grèce suivi d'une canicule précoce début juin, le mois le plus chaud depuis 1960 (début de l'enregistrement des données), selon l'Observatoire national d'Athènes.
Les mois de juillet et août ont été les plus torrides depuis 1960 et août 2024 a été le deuxième mois le plus caniculaire derrière celui de 2021, selon les mesures de l'Observatoire.
L'opérateur de gestion de l'eau d'Athènes a déjà tiré la sonnette d'alarme après la réduction du niveau du lac de barrage de Mornos, principal réservoir de la capitale au fond duquel des bâtiments abandonnés d'un village englouti lors de la construction sont réapparus au grand jour.
Les Athéniens ont été appelés à surveiller leur consommation d'eau. Aucune restriction n'a toutefois été décrétée à ce jour.
Le ministre de l'Environnement et de l'Energie, Theodoros Skilakakis, a dévoilé mercredi un plan de plusieurs milliards d'euros qui prévoit de nouveaux ouvrages et la modernisation du réseau existant afin d'améliorer la qualité de l'eau et limiter les pertes.
L.Boyle--NG