TSMC cesse de livrer un client après la découverte de ses semi-conducteurs chez Huawei
Le poids lourd taïwanais des semi-conducteurs TSMC a interrompu ses livraisons à un client en octobre après avoir découvert que ses semi-conducteurs avaient été fournis au géant chinois Huawei, en possible violation des sanctions américaines, a déclaré à l'AFP un responsable gouvernemental de Taipei.
Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC) est le plus grand sous-traitant au monde de semi-conducteurs utilisés dans tous les domaines technologiques, des iPhones d'Apple aux équipements d'intelligence artificielle (IA) de pointe de Nvidia.
Huawei, premier fabricant mondial d'équipements de réseaux internet mobiles 5G, est lui au cœur d'une guerre technologique entre Pékin et Washington. Les États-Unis ont imposé en 2019 des sanctions contre le groupe, qui ont été élargies l'année suivante, car Washington craint que sa technologie ne soit utilisée par Pékin pour de l'espionnage. Huawei nie ces accusations.
Les sanctions américaines ont eu pour effet de bloquer à Huawei l'accès à des composants et des technologies issus des États-Unis, essentielles pour fabriquer des équipements liés à l'IA.
Mais TSMC a découvert le 11 octobre que des puces fabriquées pour un "client spécifique" s'étaient retrouvées chez Huawei, a déclaré à l'AFP un responsable taïwanais ayant connaissance de l'incident, sous couvert d'anonymat.
TSMC a "immédiatement activé ses procédures de contrôle des exportations", interrompant les livraisons à ce client et en informant les autorités américaines et taïwanaises, a ajouté le responsable.
Dans un communiqué publié mercredi, TSMC dit être une "entreprise respectueuse de la loi" et déclare ne pas avoir effectué de livraisons à Huawei depuis la mi-septembre 2020, conformément aux contrôles à l'exportation en vigueur.
"Nous avons communiqué de manière proactive avec le département américain au Commerce" sur cette affaire, souligne TSMC. Le groupe précise ne pas avoir connaissance "d'une enquête à l'heure actuelle" à son encontre.
Le ministère taïwanais de l'Economie a indiqué jeudi à l'AFP que TSMC l'avait informé de l'incident, sans identifier le client en cause.
"Ils avaient déjà une relation et un contrat en place, il s'agit donc d'un ancien client", a-t-il précisé.
La société était cliente de TSMC avant 2020, date à laquelle les mesures de contrôle des exportations sont entrées en vigueur pour les entreprises, et "aucune livraison n'a été effectuée depuis le 11 octobre" à ce client, selon le ministère.
- Autosuffisance chinoise -
D'après des informations de l'agence Bloomberg publiées mardi, le cabinet de recherche canadien TechInsights a trouvé un processeur avancé, fabriqué par TSMC, à l'intérieur de la dernière puce IA de Huawei.
Huawei n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP. L'entreprise a déclaré à Bloomberg qu'elle n'avait "produit aucune puce via TSMC après la mise en œuvre des amendements apportés par le département américain au Commerce" à ses restrictions commerciales visant Huawei en 2020.
Cet incident a mis en lumière le manque de transparence de l'industrie chinoise des puces électroniques, a estimé Chiang Min-yen, chercheur à l'Institut de recherche sur la démocratie, la société et les technologies émergentes.
"Les parties extérieures ne disposent pas d'informations suffisantes pour comprendre quelles entreprises sont réellement sous l'influence de Huawei", a déclaré M. Chiang à l'AFP.
En réponse aux restrictions aux exportations imposées par les États-Unis, Pékin a relancé ses efforts pour parvenir à l'autosuffisance en matière de puces, en injectant des milliards de dollars dans ce secteur.
L'année dernière, Huawei a dévoilé un nouveau smartphone très performant, le Mate 60 Pro, équipé d'une puce qui, selon les experts, serait impossible à produire sans des technologies étrangères, remettant en question l'efficacité des tentatives pour freiner les progrès technologiques de la Chine.
Ch.Hutcheson--NG