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Xinjiang: la visite de l'ONU récupérée par la propagande chinoise
Xinjiang: la visite de l'ONU récupérée par la propagande chinoise / Photo: Handout - OHCHR/AFP

Xinjiang: la visite de l'ONU récupérée par la propagande chinoise

"De la poudre aux yeux": la machine de propagande chinoise a jusqu'ici totalement récupéré la visite que mène en Chine la cheffe de l'ONU pour les droits de l'Homme, déplorent des militants pour la défense des Ouïghours.

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Le séjour de Michelle Bachelet, fruit d'âpres négociations entre les Nations unies et Pékin, la conduit notamment dans le Xinjiang (nord-ouest), où les autorités sont accusées de répression à l'encontre de minorités musulmanes.

La région a longtemps été le théâtre d'attentats commis, selon le gouvernement, par des séparatistes et islamistes ouïghours. Au nom de l'antiterrorisme, le territoire fait l'objet depuis quelques années d'une surveillance draconienne.

Des études occidentales accusent Pékin d'avoir interné plus d'un million de Ouïghours et de membres d'autres groupes ethniques musulmans dans des "camps de rééducation", voire d'imposer du "travail forcé" ou des "stérilisations forcées". Les Etats-Unis évoquent un "génocide".

La Chine dénonce des rapports biaisés et parle de "centres de formation professionnelle" destinés à éradiquer l'extrémisme. Elle dément toute "stérilisation forcée", disant ni plus ni moins appliquer la politique nationale de limitation des naissances.

Pour des ONG et des militants de la diaspora ouïghoure, Michelle Bachelet s'est laissée entraîner dans une opération de communication du Parti communiste (PCC).

Les médias officiels chinois ont ainsi abondamment rapporté que l'ex-présidente chilienne de 70 ans aurait loué les progrès de la Chine en matière de droits de l'Homme.

Il est "clair" que Pékin utilise cette visite "pour promouvoir son propre narratif et défendre son piètre bilan en matière de droits de l'Homme", déplore Alkan Akad, militant d'Amnesty International, dans une déclaration à l'AFP.

- Conférence de presse -

L'objectif est de "montrer au monde [que la Chine] peut soumettre à sa volonté une haute responsable des droits de l'Homme de l'ONU", affirme à l'AFP Maya Wang, chercheuse à Human Rights Watch.

Michelle Bachelet est restée quasi muette cette semaine. Mais elle doit donner samedi soir, avant son départ de Chine, une conférence de presse en ligne très attendue.

Elle devrait y être assaillie de questions sur sa liberté de mouvement, ses échanges avec les habitants et son accès aux centres de détention du Xinjiang.

Militante ouïghoure basée à Londres, Rahima Mahmut dénonce déjà "de la poudre aux yeux". "Ce n'est pas l'enquête neutre, indépendante et sans entrave qu'on nous avait promise", déclare-t-elle à l'AFP.

Au lieu de cela, Pékin cherche à obtenir "un blanc-seing pour poursuivre la répression, la surveillance, la torture et le génocide", ajoute-t-elle.

Michelle Bachelet est au Xinjiang depuis mardi. Elle devait se rendre dans la capitale régionale Urumqi et dans la ville de Kashgar, selon ses services.

Que fait-elle exactement? Difficile de savoir, car au nom de la prévention contre le Covid-19, sa visite se déroule dans une bulle sanitaire qui exclut toute la presse étrangère.

La Chine comble le vide médiatique avec des comptes-rendus officiels enthousiastes de ses rencontres avec Xi Jinping ou le ministre des Affaires étrangères Wang Yi.

- "Utilisée" -

L'agence Chine nouvelle a ainsi assuré que Mme Bachelet, devant ce dernier, avait "félicité la Chine pour ses importantes réalisations en matière de (...) protection des droits de l'Homme".

Contactés par l'AFP, les services de l'ONU n'ont ni confirmé ni démenti que Mme Bachelet avait effectivement tenu ces propos.

Mais ni les Nations unies ni la Chine n'ont en tout cas mentionné spécifiquement le Xinjiang dans leurs déclarations.

Un militant ouïghour basé en Norvège, Abduweli Ayup, se dit "déçu" que Michelle Bachelet ait semblé permettre à Pékin de "mal interpréter" ses propos.

"Ils l'ont utilisée pour leur propagande", déclare-t-il à l'AFP.

Les médias chinois ont également diffusé d'abondantes images de l'ex-présidente chilienne se voyant remettre un recueil de citations de Xi Jinping sur les droits de l'Homme.

Pékin l'a souligné dès le début de la semaine: la visite de Mme Bachelet n'est pas une enquête mais une occasion de "clarifier la désinformation" dont la Chine s'estime victime.

"Elle doit avoir le courage politique et l'intégrité de s'exprimer lorsque ses paroles et sa visite sont déformées", estime Steve Tsang, directeur de l'Institut chinois de l'université SOAS à Londres.

"Si elle n'est pas préparée et incapable de le faire, elle n'aurait pas dû y aller."

W.Prendergast--NG