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A travers l'Asie, l'essor de liaisons ferroviaires soutenues par la Chine
Le Vietnam va construire une nouvelle ligne de chemin de fer avec la Chine, dernier en date d'ambitieux projets ferroviaires financés par Pékin dans la région, de l'Indonésie au Laos.
Tour d'horizon de ces chantiers achevés ou en construction, s'inscrivant dans le cadre des infrastructures des "Nouvelles routes de la Soie" lancées par la Chine pour renforcer son influence.
Laos-Chine: bonheur des touristes et commerçants chinois, l'ombre de la dette
Le Laos a inauguré fin 2021 une voie ferrée visant à connecter la capitale Vientiane à Kunming, dans la province du Yunnan (sud de la Chine). Un chantier à 5,9 milliards de dollars financé en très grande partie par des fonds et prêts chinois, Pékin contrôlant par ailleurs 70% de l'infrastructure.
Les analystes s'alarment de sérieuses difficultés de remboursement pour le Laos, dont l'endettement représente trois-quarts de son produit intérieur brut (PIB). Pour ce petit pays de 8 millions d'habitants, la rentabilité du projet semble incertaine.
Cinq trains à grande vitesse partent quotidiennement de Vientiane: l'un franchit la frontière en direction Kunming (trajet total en 9 heures et demie), trois relient Vientiane et la ville laotienne de Luang Prabang, le dernier rejoint la ville frontalière de Boten.
Une aubaine pour les touristes chinois, plus nombreux à affluer, mais aussi pour les commerçants chinois installés au Laos.
"C'est très pratique de se faire envoyer des produits ici. Avant, cela pouvait prendre quinze jours ou même un mois, maintenant c'est une semaine ou maximum 10 jours", a indiqué récemment à l'AFP Chen Quanbo, qui vend à Vientiane des sacs et valises importés de Chine.
Thailande: vaste chantier pour rejoindre le tronçon laotien
Avec une décennie de retard, la Thaïlande a donné en 2017 le coup d'envoi d'un colossal chantier à 5,4 milliards de dollars pour construire la ligne TGV qui reliera Bangkok au tronçon laotien déjà en activité et donc à Kunming.
Cette ligne, longue de quelque 600 kilomètres sur la partie thaïlandaise, entend améliorer les échanges commerciaux sino-thaïlandais. Un premier tronçon doit entrer en service en 2028, le second en 2032.
Le projet est là encore soutenu par la Chine, mais à l'inverse du Laos, Bangkok a bataillé avec Pékin pour prendre en charge le coût, gage de son indépendance.
En raison d'une différence d'écartement des rails avec ses voisins, y compris la Chine, le pays n'avait d'autre choix que de construire une nouvelle voie.
Une extension future jusqu'à la Malaisie et Singapour a été envisagée.
Indonésie: ligne TGV inédite, signe de modernisation
L'Indonésie a inauguré en octobre 2023 sa première ligne de train à grande vitesse, jusqu'à 350 km/h, qui relie les 142 kilomètres entre la capitale Jakarta à Bandung en 45 minutes -deux heures de moins qu'auparavant.
Co-construite par quatre compagnies nationales indonésiennes et China Railway International, l'infrastructure a coûté au final quelque 7 milliards de dollars.
Joko Widodo, alors président indonésien, soucieux de vanter la transformation du pays, avait salué "un symbole de la modernisation des transports publics".
Chine-Kirghizstan-Ouzbékistan: nouveau pont vers l'Asie centrale
En décembre dernier, le président kirghiz Sadyr Japarov a lancé officiellement la construction d'un chemin de fer d'une longueur totale de 523 km qui reliera Kachgar, au Xinjiang (nord-ouest de la Chine) à Andijan (Ouzbékistan), en passant par Djalal-Abad (Kirghizstan).
"Cette voie pourra assurer la livraison des marchandises venant de Chine au Kirghizstan et plus loin en Asie centrale, vers le Proche-Orient, la Turquie et même l'Union européenne", a affirmé M. Japarov.
Le projet, dont le coût pourrait atteindre 8 milliards de dollars, prévoit l'aménagement de voies dans des zones montagneuses ou recouvertes de permafrost.
Vietnam: voie ferrée au profit de l'industrie
Le Parlement vietnamien a donné mercredi son feu vert à la construction d'une nouvelle ligne de chemin de fer reliant le grand port d'Haiphong à la Chine du sud, pour un montant de plus de huit milliards de dollars, financés en partie par Pékin
La ligne, longue de quelque 390 km, desservira de grands sites manufacturiers vietnamiens où sont installés Samsung, Foxconn, Pegatron et autres géants mondiaux de l'électronique, pour beaucoup dépendants de l'arrivage régulier de composants depuis la Chine.
Une autre ligne, pas encore approuvée par le Parlement, doit à terme relier Hanoï à la province de Lang Son, qui borde la région chinoise de Guangxi, en traversant une autre vaste zone d'implantation d'usines étrangères.
Pakistan, Birmanie: projets en suspens
Existe depuis plus d'une décennie le projet d'une ligne ferroviaire reliant la région chinoise du Xinjiang au port de Gwadar, sur la côte pakistanaise, au sein d'un "corridor économique". Mais les discussions stagnent, sans aucune annonce de construction: des reliefs complexes pourraient entraîner des coûts exorbitants.
Un chemin de fer reliant le Yunnan à Mandalay (Birmanie) avait aussi été envisagé, mais est désormais au point mort en raison du conflit birman.
Des projets ferroviaires que Pékin envisageait de financer aux Philippines ont, eux, été annulés en raison des tensions diplomatiques entre les deux pays.
burs-jug/abx
G.Lomasney--NG