Nottingham Guardian - "Je préfère mourir chez moi": pour certains réfugiés ukrainiens, l'heure du retour

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"Je préfère mourir chez moi": pour certains réfugiés ukrainiens, l'heure du retour
"Je préfère mourir chez moi": pour certains réfugiés ukrainiens, l'heure du retour / Photo: Valery HACHE - AFP/Archives

"Je préfère mourir chez moi": pour certains réfugiés ukrainiens, l'heure du retour

Elle était arrivée dans le centre d'accueil pour réfugiés avec les mêmes cabas accrochés à sa poussette, mi-avril, après avoir fui l'Ukraine. Deux mois plus tard, revoilà Natalia Loukianenko dans le local parisien. Mais cette fois, sur le chemin du retour.

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Il est 20H, ce vendredi de juin, quand l'Ukrainienne de 42 ans arrive dans le centre parisien en provenance de Saint-Malo, son bébé de sept mois dans les bras, emmitouflé dans une couverture et accompagnée de son fils de 8 ans qui traîne deux lourdes valises. Juste une escale: dans quatre heures, son train part pour Berlin, puis la Pologne, avant le terminus, Kiev.

"Quand on est partis, il y avait des combats, c'était vraiment effrayant. Il y a eu des viols, des tirs, des pillages, des maisons incendiées. Maintenant, il n'y a plus tout ça, c'est beaucoup plus calme et tranquille" dans l'ouest de l'Ukraine, explique-t-elle à l'AFP.

Natalia Loukianenko n'a rien à reprocher à la France, où elle a été "bien accueillie". C'est juste "le bon moment" pour rentrer.

"Quand je suis partie, ça m'était égal que ma maison brûle, j'ai tout laissé, même les clés. Mais maintenant que ça se calme, je veux retrouver ma maison, je dois récupérer mes documents avant de tout perdre. J'ai des enfants et, même si j'ai peur, je dois penser à l'avenir", justifie celle qui travaillait dans une cantine de Kiev avant la guerre.

- "Chassé-croisé" -

A l'heure où l'exode se poursuit, avec plus de six millions d'Ukrainiens qui ont déjà quitté le pays, Natalia Loukianenko est persuadée de faire le bon choix, en rebroussant chemin: il y a deux mois, "il y avait beaucoup de monde ici", dit-elle en balayant de sa main plusieurs dortoirs vides de l'immense centre d'accueil implanté dans le parc des expositions à Paris. "Je crois que ceux qui voulaient partir sont partis. Maintenant il y a davantage de gens qui rentrent".

Une tendance difficile à quantifier, car la France ne comptabilise pas les sorties du territoire.

"On sait que certains repartent, mais on ne sait pas combien", résume sobrement Didier Leschi, patron de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui verse une allocation mensuelle à ces déplacés.

Les Nations unies ont également "observé des retours en Ukraine", mais "ces mouvements peuvent ne pas être durables en raison de la volatilité de la situation", indique Céline Schmitt, porte-parole du Haut-commissariat aux réfugiés en France.

Dans le seul centre d'accueil parisien, plus d'un millier de personnes ont déjà signalé faire route vers l'Ukraine, estime Marianne Lorenzo-Lavandier, coordinatrice du lieu pour l'association Coallia, qui "constate un chassé-croisé entre des personnes originaires du Donbass qui arrivent et des Ukrainiens qui remontent", notamment du sud de l'Europe.

- "Revenez si vous voulez" -

C'est le cas d'Olha Tkachenko, 67 ans, arrivée de Madrid avec ses deux petites-filles pour la nuit, à Paris.

Elles ont passé trois mois dans la capitale espagnole, où c'était "le paradis". "Mais les filles ont voulu rentrer et j'ai atteint un certain âge, je préfère mourir chez moi", murmure la grand-mère, cheveux blancs tenus en queue de cheval, entre deux sanglots.

Les trois femmes ont quitté Soumy (nord-est), près de la frontière russe, le 10 mars par un bus "humanitaire" vers la Pologne. C'est aussi un bus qui va désormais les emmener de Paris à Lviv (ouest).

"Je ne voulais pas quitter l'Ukraine !", raconte Natalia Shvets, 20 ans, marinière bleue assortie à sa grand-mère. "Mais ma mère voulait vraiment qu'on parte, surtout pour la grand-mère. On a beaucoup discuté du retour, au téléphone. Au début mes parents disaient +non, pas encore, pas encore+, et là enfin ils nous ont dit +vous nous manquez, revenez si vous voulez+."

Impossible, toutefois, de retrouver tout de suite la famille à Soumy. Ce sera donc Lviv, ville "plus sécurisée" et où l'université "accepte les réfugiés pour qui elle a des chambres", dit l'étudiante, tout sourire.

Elle aussi a vu parmi ses amis, ses connaissances et dans les groupes de discussions ukrainiens sur les messageries que "beaucoup rentrent", ces derniers jours.

L'Europe, juge Natalia Shvets, "est un endroit très sûr". "Mais l'Ukraine c'est notre pays, on a envie de rentrer."

D.R.Megahan--NG