

A un mois du vote au Canada, les candidats promettent de réduire la dépendance aux États-Unis
A quatre semaines des législatives au Canada, les deux principaux candidats ont promis lundi de bâtir une économie indépendante des États-Unis pour faire face aux menaces de Donald Trump, principal enjeu de la campagne.
Le président américain, ses déclarations et la menace qu'il fait peser sur l'économie et la souveraineté canadienne sont en effet au cœur de toutes les discussions actuelles.
En campagne dans la région de Toronto, Mark Carney a estimé lundi que puisque "le président Trump essaie de restructurer fondamentalement l'économie américaine", le Canada devra "réinventer" la sienne.
"Nous devons construire une nouvelle économie, plus résiliente et qui pourra réussir dans ce qui sera un monde radicalement différent" et "qui pourra prospérer sans tenir compte de ce qui se passe aux États-Unis".
Le nouveau Premier ministre Mark Carney, qui a remplacé Justin Trudeau mi-mars, a donné un nouvel élan au Parti libéral, lequel semblait promis à une défaite électorale historique il y a quelques mois.
Dans les sondages récents, les libéraux devancent dorénavant les conservateurs de Pierre Poilievre, qui, selon les experts, a du mal à adapter son message dans le nouveau contexte. Il lui faut tordre le cou à l'idée qu'il serait proche, de part son style et certaines idées, du président américain.
Cet homme politique de carrière, âgé de 45 ans, a mis l'accent sur des réductions d'impôts, l'amélioration de l'accès au logement et le développement des ressources naturelles pour faire pièce aux pressions américaines.
"Il est temps de faire du Canada une forteresse économique", a-t-il déclaré lundi en déplacement au Nouveau-Brunswick, province de l'est.
"Avec Donald Trump menaçant notre pays, nous avons besoin de grands projets. Nous devons être capables de faire passer nos ressources à travers le Canada, en contournant l'Amérique, pour pouvoir commercer davantage entre nous et vendre nos ressources au monde".
- "Dirigeant fort" -
Selon tous les experts, la question que les Canadiens vont se poser au moment de déposer leur bulletin le 28 avril sera simple: qui de Mark Carney ou de Pierre Poilievre pourra le mieux affronter Donald Trump ces prochaines années ?
"L'économie est le principal enjeu pour moi dans cette élection, ainsi que tout ce qui touche au libre-échange avec les Etats-Unis", raconte à l'AFP Carol Salemi, électrice d'Ottawa.
"Nous avons besoin d'une véritable négociation sur le commerce avec eux et d'un dirigeant fort pour le faire", ajoute-t-elle.
Il nous faut "quelqu'un de ferme face aux Etats-Unis. Il semble que tout le monde soit d'accord sur ce point et c'est bien", renchérit Danielle Varga, 22 ans.
La semaine passée, Mark Carney a dû interrompre sa campagne après l'annonce par Donald Trump de son intention d'imposer des droits de douane de 25% sur les importations de voitures. Une mesure qui viendrait s'ajouter aux tarifs douaniers déjà appliqués par Washington sur l'acier et l'aluminium.
Dans la foulée, les deux hommes ont eu un appel qualifié d'"extrêmement constructif" par le président américain. Un changement de ton de sa part, qui n'est pas passé inaperçu au nord de la frontière.
Mark Carney, 60 ans, ne cesse de répéter que son expérience des crises est un immense atout. Ce novice en politique, qui n'a jamais été élu, a dirigé la banque centrale du Canada au moment de la crise financière de 2008-09 et celle d'Angleterre en plein Brexit.
"Le président Trump veut voir les libéraux rester au pouvoir. Nous savons pourquoi: car avec eux le Canada est faible et ils laisseront nos investissements s'enfuir vers les Etats-Unis", attaque son adversaire conservateur.
Dans ce contexte, les autres partis, notamment le Nouveau parti démocratique (NPD) de Jagmeet Singh et le Bloc Québécois de Yves-François Blanchet, sont à la peine dans les sondages, la crise nationale semblant pousser les électeurs vers les deux grandes formations politiques.
"C'est vraiment une période exceptionnelle", juge Geneviève Tellier, professeure de sciences politiques à Ottawa, qui estime que "le Canada est à la recherche d'un sauveur".
Les Canadiens se tournent vers Mark Carney, car "ils veulent de la sécurité et une figure rassurante en temps de crise", renchérit Daniel Beland, professeur de sciences politiques à l'université McGill de Montréal.
C.Queeney--NG